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La construction discursive du “locuteur francophone” en milieu minoritaire. Problématiques, méthodes et enjeux

Catégorie
Date
Jeu, 10/04/2012 - sam, 10/06/2012
Date limite d'inscription

« La construction discursive du “locuteur francophone” en milieu
minoritaire. Problématiques, méthodes et enjeux »

04.10.11-06.10.11
Moncton, N.B.

Le Centre de recherche en linguistique appliquée de l’Université de
Moncton et
CoDiRe & IRFFLE de l’Université de Nantes

Avec la collaboration du projet Le français à la mesure d¹un continent,
dirigé par France Martineau de l’Université d¹Ottawa, subventionné par
le Conseil de recherches en sciences du Canada dans le cadre des Grands
travaux de recherche concertée
et du Centre d’études françaises et francophones de la Louisiana State
University de Baton Rouge

Présentation

L’objectif du colloque est d’interroger les concepts et les discours qui
ont servi à la construction du « francophone », considéré souvent comme
le même partout dans la francophonie, sans tenir compte de
l’hétérogénéité et de la diversité qui le constituent. Jugés à l’aune
d’un français unique, les francophones des milieux minoritaires ou
périphériques se voient parfois remis en doute dans leur qualité même de
locuteurs du français. Par ailleurs, le discours sur la diversité devenu
dominant depuis les années 1980 n’a pas pour autant réglé le problème.
Le francophone est maintenu à l’intérieur de frontières territoriales et
identitaires étroites, ce qui donne lieu à une multitude d’identités
régionales rattachées à des « langues locales » et qui reproduisent,
dans certains cas, le schéma ancien d’une langue et d’une culture liées
à un lieu spécifique, comme c’est le cas en Amérique du Nord. Ce
processus a été accéléré par la nouvelle économie mondialisée, où le
tourisme culturel a, entre autres, misé sur le culte des différences.
Dans la foulée de cet élan pour les « cultures locales », les travaux
sur la langue du francophone ont, dans le meilleur des cas, montré la
pluralité des formes que peut prendre sa langue, mais dans certaines
limites (sur les plans phonétiques et lexicaux surtout) ; dans le pire
des cas, ils ont figé cette langue dans l’exotisme linguistique qui mène
à la stéréotypie. Le francophone ne devient plus qu’un diversifié - un
Acadien, un Québécois, un Wallon, enfermé dans une catégorie stérile
dont il a du mal à se défaire. Certes, la situation est différente en
Afrique où le plurilinguisme des locuteurs est maintenant perçu comme
libérateur, mais l’impact des discours essentialistes provenant de
l’Europe (surtout de la France) n’est pas non plus à négliger.

Ces nouvelles reconfigurations locales répondent souvent à des
impératifs culturels et économiques (les deux étant liés) qui tentent
d’afficher l’authenticité des cultures et des langues dans une
francophonie qui peine à montrer sa diversité (Heller et Labrie 2003).
Mais l’hétérogénéité constitutive des francophones continue d’être niée
dans ces nouveaux schémas, le folklore s’étant substitué à l’homogène
pour faire place à une essentialisation des langues et des cultures qui
n’en est que renforcée. On dira ainsi que les
Suisses francophones sont
et parlent de telle façon, les Québécois de telle autre, les Acadiens
aussi et ainsi de suite. Rattachées à l’imaginaire du même, les
catégories sociales naguère créées à partir de ceux qui « parlent bien »
et de ceux qui « parlent mal » rivalisent avec celles créées à partir de
la vision idéalisée de la diversité tous azimuts, qui renvoie à une
nouvelle compartimentation (Canut et Duchêne 2011), fondée cette fois
sur de nouvelles hiérarchisations linguistiques (maternelle / nationale,
nationale / internationale, minoritaire / nationale) ( Ibid : 7).

Appréhender la question du locuteur francophone en milieu minoritaire
nécessite de s’interroger sur le poids des idéologies linguistiques
véhiculées dans les discours depuis les premiers mouvements d’expansion
du français et d’analyser les méthodes et les concepts qui ont favorisé
une vision microscopique des phénomènes linguistiques souvent au
détriment d’une vision d’ensemble de la situation. L’hyperspécialisation
dans certains courants de la linguistique et la compartimentation des
savoirs qui en résulte ont fait en sorte d’exclure les explications
d’ordre politique et social des phénomènes linguistiques et ont mis au
rancart les idéologies linguistiques à la base de leur construction. Il
s’agira donc dans ce colloque de poursuivre l’interrogation suscitée par
Le français dans l’espace francophone (Robillard et Beniamino 1993) et
L’Insécurité linguistique dans les communautés francophones
périphériques (Francard et alii 1993). Les deux ouvrages, publiés la
même année, mettaient l’accent sur la pluralité des espaces
francophones, sur les différentes façons de se concevoir comme
francophones et appelaient (indirectement) à une sociolinguistique de la
périphérie, en écho aux textes de Robert Lafont publiés à partir de
1952.

Quels discours les scientifiques ont-ils produits sur les « francophones
» et leurs langues en milieu minoritaire ? Comment ces discours ont-ils
été relayés dans le grand public ? Que veut dire le terme « francophone
» pour les locuteurs des régions périphériques ? Est-il lié à une
identité quelconque ? Quels sont les discours des locuteurs eux-mêmes au
sujet de leurs pratiques et de celles des autres ? Quelles sont les
stratégies les plus couramment en usage pour se positionner entre
uniformisation et différenciation ? Comment ces discours sont–ils liés
aux discours institutionnels de la francophonie ? Quels sont les
rapports de pouvoir qui s’exercent et comment se manifestent-ils ? Même
si tous les francophones vivant dans les milieux périphériques n’ont pas
été colonisés au sens propre, leur imaginaire n’a-t-il pas été façonné
dans un rapport de type colonial ?

Ce sont à toutes ces questions, et à d’autres encore, que nous vous
invitons à réfléchir dans le cadre de ce colloque international.

Références :

Canut Cécile et Alexandre Duchêne (2011). « Introduction.
Instrumentalisations politiques et économiques des langues : le
plurilinguisme en question », Langage et société , 136 : 5-12.

De Robillard Didier et Michel Beniamino (dirs.) (1993-1996). Le français
dans l'espace francophone. Paris, L'Harmattan, 2 vols.

Francard Michel (éd.) (1993-1994). L’insécurité linguistique dans les
communautés francophones périphériques . Actes du colloque de Louvain-la
Neuve, 10-12 novembre 1993 , Cahiers de l'Institut Linguistique de
Louvain , 19 (3-4) / 20 (1-2).

Heller Monica et Normand Labrie (éds.) (2003). Discours et identités. La
francité canadienne entre modernité et mondialisation . Cortil-Wodon,
Éditions Modulaires Européennes (Proximités – Sciences du langage).

Calendrier et informations pratiques :

Lancement de l’appel à communications début octobre 2011.

Date limite pour la soumission des propositions de communication : le 31
mars 2012.

Communication des décisions du comité scientifique : fin avril 2012.

Les propositions de communication (résumé ne dépassant pas 350 mots hors
références bibliographiques éventuelles, correspondant
à une
communication de 20 minutes) devront être adressées sous présentation
anonyme en attachement à un courriel spécifiant nom, affiliation de
l’auteur de même que le titre de la communication, à l’adresse du Centre
de recherche en linguistique appliquée : crla@umoncton.ca .

Frais d’inscription au colloque (incluant les repas du midi et les
pauses santé) : 100$ par participant, gratuit pour les étudiants.

Dans le cadre du
Colloque international
« Le français et la construction discursive du concept de « francophonie
» dans l'espace Francophone »

Colloque international organisé par :
CRLA de l'Université de Moncton,
CoDiRe & IRFFLE l'Université de Nantes
& la plateforme GRAMM-R

Le mot « francophonie » renvoie pour le moins à trois classes de « faits
humains et sociaux », qui en tant que tels sont promus au rang d'«
observables » et traités comme tels par plusieurs disciplines des
sciences humaines et sociales : les sciences du langage, bien sûr, la
sociolinguistique, l'histoire, la sociologie, les sciences politiques,
les disciplines qui étudient les littératures et les cultures, etc. On
retrouve dans des discours scientifiques (qui distinguent ces trois
champs référentiels et cherchent à faire apparaître les liens qui
existent entre eux) :
°l'ensemble des communautés linguistiques qui parlent français, comme
langue première ou seconde,
°les individus qui ont appris à parler français comme langue étrangère
et qui le parlent en situations particulières (par exemple, pour faire
des études dans un pays francophone ou pour participer à la diffusion de
langue et de la culture françaises dans leur pays non francophone),
°les différents mouvements politiques et sociaux qui, en utilisant
plusieurs registres d’action et plusieurs cadres de référence, cherchent
à donner au facteur linguistique un sens politique et notamment,
l'organisation internationale créée en 1970, qui réunit à l'heure
actuelle 75 États et gouvernements, dont 56 membres et 19 observateurs,
institution désignée par le mot Francophonie, avec un « F» majuscule.
Mais on retrouve ces « espaces francophones » également et surtout dans
les discours : politiques et institutionnels, dans les discours
médiatiques, dans les discours des acteurs de la « Francophonie », dans
les discours quotidiens des francophones. Et c'est dans et par ces
discours que les espaces d'action et de pensée de la francophonie et de
la Francophonie , comme tous les faits humains et sociaux, sont aussi et
le restent, malgré leur promotion au statut d'« observables », « le
produit de constructions interprétatives », pour reprendre l'expression
de Rastier (Rastier 2004: 4), et en tant que tels, des lieux de
construction de soi (comme appartenant à l'espace francophone) et de
l'autre (une altérité nécessaire au dialogue d'échange et d'affirmation
d'un système de valeurs). Cette construction identitaire à travers les
discours des acteurs sociaux appartenant à l'espace francophone fait
l'objet de nombreuses recherches en sciences politiques, en sociologie,
en histoire des cultures et en analyse linguistique du discours et
commencent à faire l'objet d'analyses sémantiques.
Le but de ce colloque en trois volets est précisément d’envisager :
la part de l'héritage historique et du présent géo-politique dans la
construction des identités francophones et des espaces francophones,
et la part de la construction discursive de soi et du monde dans le vécu
par les communautés francophones de leur identité et de leur altérité
linguistique et culturelle dans la diversité de leurs contextes.

Annette Boudreau & Olga Galatanu
Université de Moncton Université de Nantes

Le premier volet de ce double colloque, intitulé « Sens et signification
dans les espaces francophones », se déroulera à Nantes du 19 au 21 avril
2012. Le deuxième volet, intitulé « La construction discursive du
“locuteur francophone” en milieu minoritaire.
Problématiques, méthodes
et enjeux », se déroulera à Moncton, du 4 au 6 octobre 2012.
Un troisième volet est prévu autour de la thématique générale de ce
double colloque, en octobre 2013, à Bruxelles. Ce troisième colloque
sera organisé dans le cadre de la plateforme internationale de recherche
GRAMM-R, par Vrije Universiteit Brussel, l’Université Libre de
Bruxelles, l’Université de Liège et l’Université de Nantes.

Comité d'organisation général des deux colloques :
Laurence Arrighi (Université de Moncton), Abdelhadi Bellachhab (CoDiRe,
Université de Nantes et Université Lille 3), Annette Boudreau
(Université de Moncton), Benoît Bourque (Université de Moncton), Loïc
Fravalo (Université de Nantes), Olga Galatanu (Université de Nantes),
Tracy Heranic (Université de Nantes), Matthieu LeBlanc ( Université de
Moncton), Virginie Marie (CoDiRe – CERCI, Université de Nantes),
Christophe Traisnel (Université de Moncton & Institut Canadien de
Recherche sur les minorités linguistiques), Isabelle Violette
(Université de Moncton), Ana Maria Cozma (CoDiRe, Université de Nantes
et Université de Turku).

Comité Scientifique général des deux colloques :
Présidentes : Annette Boudreau (Université de Moncton), Olga Galatanu
(Université de Nantes)
Mourad Ali – Khodja (Université de Moncton), Sylvie Dubois (Centre
d'études françaises et francophones, Université de LSU, Louisiane) ,
Loïc Fravalo (Université de Nantes), Françoise Le Jeune (Université de
Nantes), France Martineau (Université d'Ottawa), Michel Pierrard (VUB),
Jane Smith (University of Maine) , Christophe Traisnel (Université de
Moncton & Institut Canadien de Recherche sur les minorités
linguistiques), Dan Van Raemdonck (ULB).

Lise Landry
Centre de recherche en linguistique appliquée
Faculté des arts et des sciences sociales
11, Allées des Arts
Université de Moncton
Moncton, N.B. E1A 3E9
Téléphone: (506) 858-4057
Télécopieur: (506) 858-4568
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